Le bonheur est dans le tout près?

Vers un développement polycentrique de la Grande Région ?

Table Ronde Economique Grande Région 26 mars avec Ministre Etienne Schneider et le Président Patrick Weiten

Lundi 26.03.12 à 18:30

Au Cercle Cité – AUDITORIUM CITÉ

Presserevue Disc Economie

Transcription du débat: DebatEconomielongfr

Participants:

  • Mme Mannes-Kieffer Elisabeth, Premier conseiller de gouvernement au Ministère de l’Economie du Luxembourg
  • M. Patrick Weiten, Président du Conseil Général de la Moselle
  • M. Luc Henzig, Administrateur chez PriceWaterhouseCoopers

Modération :

Carlo de Toffoli et Mike Mathias, Gréng Stëftung

La discussion

Selon nos invités, les différentes parties de la Grande-Région se trouvent dans une situation concurrentielle sur le plan économique, bien que des exemples de coopération spontanée et de concertation active existent. Néanmoins, celles-ci représentent des exceptions. De plus, bien que chaque région cherche ses propres niches économiques, une complémentarité économique n’existe pas pour l’instant. Ceci mène à des problèmes multiples pour la cohésion sociale et le dynamisme économique de la Grande-Région : différents niveaux de vie, déséquilibres entre offre et demande sur le marché de l’emploi, absence de synergies, etc.

Or, le déséquilibre n’est pas tel que le Luxembourg serait l’unique et seul moteur économique de la Grande-Région. Des projets comme celui de la « mégazone d’Illange » en Lorraine illustrent le polycentrisme vers lequel la Grande-Région pourrait se développer. Luc Henzig résume l’intérêt de ce développement du point de vue luxembourgeois : « Aujourd’hui il faut chercher la complémentarité. Il est important de comprendre que plus nos voisins investissent chez eux, mieux ce sera pour le Luxembourg ! Plus nos voisins seront riches, le mieux ce sera pour nos perspectives d’avenir ! Car nous ne savons pas comment l’économie luxembourgeoise va se développer. Si le Luxembourg s’essouffle en tant que moteur économique, il nous faudra un relais dans nos régions voisines. » Le président du Conseil général de la Moselle, Patrick Weiten, argumente de manière similaire : « Toute la Grande-Région profitera du projet sino-européen au niveau de la création d’emplois et des investissements dans les infrastructures de transport. » Environ 3000 emplois seront ainsi créés ensemble avec un réseau logistique considérable (au Luxembourg, Cargolux sera chargé du volet transport aérien).

Un autre sujet sensible concerne le futur de la sidérurgie dans la Grande-Région, qui, actuellement, se voit menacé par l’argument du manque de compétitivité sur un marché global. Selon nos invités, ce problème dépasse les compétences de la Grande-Région. Patrick Weiten estime que « pour le moment nous ne pouvons que réagir pour essayer de sauver ces emplois. Mais, en fait, il faudrait une coopération au niveau intergouvernemental et européen. » Or, faute de concertation au niveau européen, ce sont les stratégies nationales qui dominent:  « Nous aurons peut-être la chance de voir se réaliser le projet ULCOS en Lorraine qui consisterait à capter et stocker les émissions de gaz à effet de serre. […] La sidérurgie lorraine dépend d’ULCOS. » Elisabeth Mannes-Kieffer déplore qu’en Europe la priorité soit donnée à une politique climatique qui engendre des coûts supplémentaires pour la sidérurgie. En contrepartie il manquerait « une vraie politique industrielle au niveau de l’Union Européenne ». Et Luc Henzig d’ajouter :« Il faut se poser la question si la demande restera soutenue […] en Europe. La seule chance pour que la production puisse rester compétitive serait si les coûts de transport augmenteraient significativement et que l’importation de l’acier devienne très chère. »

Autre thème récurrent du débat : Le manque de « gouvernance », c’est-à-dire de concertation institutionnalisée sur le développement économique entre responsables politiques et administrations des différentes parties de la Grande-Région. Nos invités soulignent que des tentatives de coopération institutionnalisée (une volonté de « se parler » davantage, comme le formule dit Luc Henzig) existent, mais qu’il reste encore beaucoup à faire. Patrick Weiten explique : « Je crois qu’un des problèmes est le fait que la‘Grande-Région’ n’existe pas. Du moins, elle n’est pas reconnue en France. Bien qu’on laisse beaucoup d’autonomie aux régions, les relations bilatérales sont établies de gouvernement à gouvernement. […] alors que beaucoup des domaines où il faudrait travailler ensemble sont des domaines qui nous concernent en tant que région, département ou commune. » Or les choses seraient en train d’évoluer. Weiten cite l’exemple d’un projet de covoiturage de voitures électriques pour les déplacements entre grandes villes de la Grande-Région : « Le projet sera lancé en Moselle ; or il nous fautdra une masse critique d’au moins 300 000 participants. Ce projet ne serait donc pas possible sans la coopération du Luxembourg. J’ai rencontré le ministre du Transport Claude Wiseler qui est très intéressé par le projet et qui mettra en place une troisième voie sur l’autoroute A3 réservée au transports collectifs et au covoiturage. Et il y a des entreprises luxembourgeoises qui sont prêtes à s’engager dans ce sens. Voilà un exemple sur lequel nous avançons ! Et je suis convaincu qu’on trouvera aussi des accords sur les autres dossiers importants. »

Mannes-Kieffer estime qu’au niveau bilatéral ou trilatéral on arrive d’ores et déjà à résoudre beaucoup de problèmes : « Il ne faut donc pas être trop pessimiste. Il y a aussi des initiatives très concrètes qui se réalisent. La dernière qui a été mise en place est l’institutionnalisation de la commission intergouvernementale franco-luxembourgeoise […] Nous y essayons d’attaquer tous les problèmes qui se posent entre la Lorraine et le Luxembourg notamment en termes des frontaliers, de qualifications, de santé, de logistique etc. » Sans oublier le projet de région métropolitaine polycentrique concernant en premier lieu l’aménagement du territoire et les stratégies à long terme : « Une concertation est prévue ! On pèche peut-être par manque de communication vers l’extérieur, mais il y a plein de choses qui se font sur ce plan-là. »

Une conférence organisée par la Gréng Stëftung Lëtzebuerg avec le soutien de la Green European Foundation, subventionnée par le Parlement Européen.

Comments are closed.